« Le Département montre l’exemple »
Issu du monde bancaire, depuis longtemps sensibilisé aux enjeux du développement durable, Garrett Nixon a lancé en 2020, un projet de reconversion professionnelle pour s’y consacrer pleinement. Il a ensuite franchi le pas privé / public, et rejoint le Département en tant que Chargé de mission RSE le 1er septembre 2022. Une fonction qui s’intéresse principalement au volet socio-économique de la Responsabilité sociétale à travers le prisme de l’emploi et de l’inclusion professionnelle. Interview.
Pour quelles raisons le Département se préoccupe-t-il de la RSE ?
La Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) repose traditionnellement sur un triptyque : environnement, social et économie. Le Conseil Départemental agit déjà sur le premier volet dans le cadre de son plan de transition écologique, déployé notamment à la suite de son bilan carbone. Ma mission se concentre donc sur les deux autres aspects, afin de donner davantage de visibilité et de structurer une démarche déjà existante, que ce soit via ses stratégies emploi « L’Emploi d’abord » ou alimentaire « Manger mieux, manger drômois ». Appréhender les volets sociaux/sociétaux de la RSE suppose une approche multipartite : c’est en développant les synergies entre tous les acteurs du territoire que nous réussirons à renforcer les solidarités et à assurer l’égalité des chances. Au final, la RSE a pour but de créer de la « valeur partagée » et faire converger les intérêts des entreprises avec ceux de la collectivité et des citoyens. C’est pourquoi la démarche est fondamentale. (Lire la suite de l’article)
De quelle manière cela se concrétise-t-il du point de vue de l’emploi ?
Notre priorité est d’accélérer l’inclusion professionnelle des publics éloignés de l’emploi et pour lesquels le Département est pleinement mobilisé, tels que les bénéficiaires du RSA. Le dispositif du RSA doit être un levier, lorsque cela est possible, vers le retour à l’emploi durable. Il nous faut donc être dans une logique d’amélioration continue des outils existants et pouvoir en créer de nouveaux pour gagner en efficacité. Par exemple, à travers notre soutien aux structures d’insertion par l’activité économique, ou encore via les entreprises qui bénéficient d’une AIE (Aide à l’Immobilier d’Entreprise). Ces dernières s’engagent, en contrepartie, à créer des emplois ; dans le cadre de la RSE, nous les incitons à s’orienter vers des publics que nous accompagnons (bénéficiaires du RSA, jeunes, personnes en situation de handicap, et seniors) et les orientons dans cette démarche.
L’objectif du Département est d’atteindre 50 000 heures d’insertion dans les marchés publics chaque année. Où en est-on aujourd’hui ?
Effectivement, les clauses sociales ou clauses d’insertion dans les marchés publics permettent à un donneur d’ordre, maître d’ouvrage, de réserver la réalisation d’une partie des heures nécessaires à l’ouvrage à des collaborateurs issus de parcours d’insertion. Dans la Drôme, nous avons atteint 31 000 heures en 2022. Afin d’accompagner les collectivités (incluant le Département) et entreprises dans la mise en œuvre de ces clauses, le Département finance et s’appuie sur des « facilitateurs » : ce sont des experts au sein de structures spécifiques, qui aident les collectivités à calibrer le nombre d’heures potentielles d’insertion en fonction du niveau d’expertise recherché et de la typologie du marché. Ainsi, le collectif « Emploi Solidaire » joue le rôle de facilitateur pour les marchés du sud du département tandis que la Plateforme Emploi gère le centre et le nord. De cette façon, nous souhaitons contribuer activement à l’objectif de 30% des marchés intégrant au moins une considération sociale prévu par le Plan National des Achats Durables 2022-2025.
De manière générale, les entreprises drômoises se sentent-elles concernées par la RSE ?
La dynamique territoriale est assez forte. Plusieurs grandes entreprises locales telles que Cheval, Koesio ou Valrhona sont largement impliquées et source d’inspiration. Si la réglementation commence progressivement à contraindre une partie des PME/PMI à travers la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD), nombre d’entre elles souhaitent malgré tout s’investir depuis un certain temps. L’évènement Dynamic’R (porté par le Réseau Entreprendre en Drôme Ardèche, la CCI Drôme et la CPME26) ou le club drômois « Les entreprises s’engagent » porté par l’Etat, sont autant d’initiatives qui créent de l’émulation autour du sujet. À ce stade, beaucoup d’entreprises drômoises agissent en interne mais souhaitent aussi s’investir sur le volet sociétal, en dehors de leur enceinte. Face à un écosystème très éclaté et composé de multiples acteurs, il n’est pas toujours facile de s’y retrouver. Le rôle du Département consiste justement à mettre les entreprises en relation avec les bons interlocuteurs pour accélérer le mouvement.
Est-ce que la RSE s’intègre aussi au sein du Département ?
Naturellement, le Département doit être exemplaire en la matière et nous portons notre propre plan d’actions. En interne, l’idée consiste à rencontrer l’ensemble des directions opérationnelles pour identifier les axes de travail et développer les synergies, à l’image de ce qui s’est fait dans le cadre du parcours numérique solidaire avec la mise à disposition d’ordinateurs reconditionnés pour les bénéficiaires du RSA à un coût symbolique. Côté Emploi, plusieurs indicateurs font l’objet d’un suivi régulier, qu’il s’agisse du nombre d’apprentis, de stagiaires ou de contrats aidés accueillis au sein des services de la collectivité. Ainsi, en 2023, le Département a recruté 68 apprentis sur un objectif annuel de 100 et 134 stagiaires pour une cible à 200.
D’autres projets sont en cours de construction. Nous souhaitons par exemple travailler sur le réemploi et la réutilisation des matériaux, pour lequel la loi AGEC fixe un cap, tout en sachant que des structures ESS ou de réinsertion sont déjà actrices du sujet au sein du territoire. De même, nous nous interrogeons sur les liens possibles entre la Maison De l’Autonomie et les collèges dont le Département a la charge pour assurer la promotion des métiers du service à la personne, actuellement en grande tension de recrutement. Ou encore côté alimentation, nous souhaitons favoriser la solidarité alimentaire avec l’ambition de rapprocher les entreprises des structures associatives pour les aider à se « professionnaliser » grâce à un partage d’expertise et de compétences. Le projet RSE a ainsi pour vocation de mobiliser de manière transversale les différentes compétences du Département afin de répondre à des enjeux sociétaux.