ACCOMPAGNER LE DÉVELOPPEMENT ET L’INNOVATION DES ENTREPRISES POUR VALORISER NOS BOIS LOCAUX

INTERVIEW : Pierre DEFOSSE, co-gérant des Toitures Montiliennes

De l’exploitation forestière à la construction bois en passant par la transformation, les entreprises de la filière forêt-bois de la Drôme sont présentes sur de nombreux marchés. À ce jour, elles représen-tent plus de 2 400 emplois et un chiffre d’affaires estimé à 260 millions d’euros. Pour rester compéti-tives et continuer à valoriser le bois local, la plupart d’entre elles ont fortement investi durant ces 5 dernières années avec un montant global estimé à 15 M€. Un développement soutenu par le Dépar-tement à toutes les étapes de la chaîne : les entreprises forestières, les scieries et les entreprises dites de seconde transformation. Illustration avec le témoignage de Pierre Defosse, directeur opéra-tionnel des Toitures Montiliennes.

Quelques mots sur Les Toitures Montiliennes…
La société, spécialisée dans la charpente, la couverture et la construction bois, a été créée par les frères Marion il y a presque 40 ans à Montélimar. En ce qui me concerne, j’ai intégré l’entreprise avant son rachat il y a 8 ans. L’opportunité d’une reprise en SCOP (Société Coopérative Ouvrière de Production) m’a séduit, sans compter la spécificité des Toitures Montiliennes : nous gérons de nombreux chantiers atypiques reposant sur une forte ingénierie. La construction bois est devenue notre principale activité, avec une zone d’intervention qui s’étend de Lyon jusqu’à Nice. 50% de nos chantiers relèvent de marchés publics ; pour le reste, ce sont des projets de professionnels dans des secteurs comme l’hôtellerie, la viticulture, le tertiaire, etc. Aujourd’hui, nous sommes 9 associés sur 35 salariés pour un chiffre d’affaire de 7 M€, contre seulement 3M€ pour 23 salariés en 2015. Malgré cela, nous ne parvenons pas à répondre à une demande en construction bois qui explose face aux enjeux de réduction des gaz à effet de serre.

Le sourcing local de la matière première fait-il partie de vos priorités ?
Bien évidemment, nous essayons d’utiliser des essences locales, notamment des résineux, autant que faire se peut. Mais les scieries drômoises ne peuvent fournir que 50% de nos besoins. L’offre de matériaux transformés est encore trop limitée. Néanmoins, nous travaillons exclusivement avec du bois français et nous bénéficions du label PEFC, gardien de l’équilibre forestier. Aujourd’hui la filière forêt-bois nationale a besoin d’investissements massifs pour tenter d’égaler ses voisins alle-mands ou scandinaves mais nous partons de très loin et cela prendra forcément du temps ! Dans la Drôme, nous avons la chance de pouvoir compter sur le soutien du Département.

De quelle manière cet accompagnement se matérialise-t-il ?
Le Département a financé une partie de nos acquisitions de machines. Ainsi, nous avons récem-ment investi plus de 500 K€ dans une machine à commande numérique ; le parc de grues sera aus-si renouvelé prochainement. En outre, avec d’autres entreprises locales comme Royans Charpente, nous répondons régulièrement à des appels d’offres du Département pour des projets en construc-tion bois. Ces dernières années, nous avons participé à l’extension de l’auberge des Dauphins dans la forêt de Saoû mais aussi à l’édification des collèges de Saint-Donat-sur-l’Herbasse, Mercurol, Cléon d’Andran et prochainement Suze-la-Rousse. Enfin, la Drôme sensibilise et oriente les de-mandeurs d’emplois vers les métiers en tension de la filière. De notre côté, nous sommes parte-naires de Sylva Campus, une école basée à Montélimar et spécialisée dans les métiers de la forêt et du bois.

Quel est l’avenir de la filière forêt-bois française face aux enjeux climatiques ?
En dépit de certaines idées reçues, la ressource bois est bien gérée en France et ce, depuis plus de 700 ans. En 1669 par exemple, l’Edit de Colbert sur les eaux et forêts, l’équivalent du premier code forestier, visait à protéger et restaurer la ressource en bois, de chêne notamment, pour la future construction navale. Depuis longtemps, un travail est mené sur les essences à planter et à utiliser. Sur les 30 dernières années, la superficie de la forêt française a même crû de la surface de la Bre-tagne. Toutefois, face au réchauffement climatique, des problématiques émergent et nous devons réfléchir à l’adaptation des nouvelles plantations, notamment des essences méditerranéennes. Par exemple, tous les épicéas qui poussent à moins de 1000 mètres d’altitude sont condamnés à mourir à cause du scolyte, un insecte prédateur qui envahit les forêts françaises. Si le bois pourra malgré tout être exploité, garantissant une volumétrie suffisante pour la construction dans les 10/15 pro-chaines années, nous ne savons pas ce qu’il se passera ultérieurement… Nous avons besoin d’une vision long terme et d’une véritable politique en la matière. Il faut aussi ré-industrialiser les entre-prises de la première transformation en formant des bûcherons et des scieurs. Seulement 7 opéra-teurs de scierie sortent diplômés chaque année en France… Le chemin est long mais nous sommes sur la bonne voie !

https://www.toitures-montiliennes.fr/


Le saviez-vous ?

  • 1 000 m3 de bois locaux mis en œuvre génèrent 21 emplois à temps plein et non délo-calisables pour un an dans la filière.
  • 1 m3 de bois mis en œuvre séquestre 1 tonne de CO2 et évite 1 tonne de CO2 fossile émise pour la fabrication et l’emploi d’un autre matériau.
  • En Rhône-Alpes, le secteur de la construction bois représente près de 400 entreprises, majoritairement des PME, pour un chiffre d’affaires de 375 M€.


Zoom sur… FIBOIS Drôme Ardèche
L’interprofession en charge de la promotion et de l’animation de la filière forêt-bois accompagne l’ensemble des professionnels sur des projets individuels d’investissement avec une aide au mon-tage des dossiers pour les différents dispositifs proposés dans le cadre du FEADER (Fonds Euro-péen Agricole pour le Développement Rural). Parmi les autres missions de FIBOIS : l’organisation de journées techniques à l’intention des professionnels, la réalisation de veille sur des sujets d’actualité ou encore la participation à des forums de l’emploi. Elle recense également les offres d’emploi du secteur et propose des visites d’entreprises et de centres de formation pour les publics en insertion, en partenariat avec le Département de la Drôme.

En savoir plus : https://www.fibois.com/